Le blues andalou
Par Guillermo Che Segundo Godínez (alias Guillaume Chérel) Journaliste, écrivain et critique littéraire
Enfant, le flamenco m’a toujours remué, sans que je comprenne pourquoi. Jusqu’à ce que j’apprenne que du sang andalou coulait dans mes veines. Et ma mère, Lolita Godínez, m’a toujours dit que j’avais les mains de son père, Eusebio (Godínez), né à Hoyos, un petit village d’Estrémadure, à la frontière portugaise, pas loin de Cáceres et Ciudad Rodrigo. Or donc, mon abuelo, que je n’ai pas connu puisqu’il est mort alors que j’étais dans le ventre de qui vous savez… avait une mère (mon arrière-grand-mère), dont j’aurais hérité la couleur des yeux (verts). Elle s’appelait Angela Torrecilla Rodríguez, née à Séville, et était chanteuse et danseuse de flamenco : nous y voilà ! Les autres membres de ma famille espagnole s’appelaient Urbano Godínez Sandine, Tomás Godínez y Godínez, Eulesteria Sandine Obregón, olé !
Tout ça pour dire que cette histoire de famille (et de flamenco) fait que je chante le flamenco, sans l’avoir appris, sans savoir ce que je dis (si, si… faites-moi boire du rioja, vous verrez), comme si j’étais envoûté par Manitas de Plata, dont il est question par ailleurs dans ce livre. Et pour cause, pas de Gipsy Kings sans lui. Et peut-être... pas de Djelloul « Chico » Bouchikhi, né à Arles en 1954, d’un père marocain et d’une mère algérienne, cofondateurdes Gipsy, qu’il quitte au début des années 90 pour désaccord avec leur producteur, mais après un disque d’or aux États-Unis, et les tubes Bamboleo et Djobi Djoba… Voilà la force de la musique andalouse. Faire d’un Maroco-Algéro-Français un véritable Gitan arlésien, qui joue mieux de la guitare flamenco qu’un Manouche de Treuilmon. Parce que le flamenco transperce l’âme et découvre l’homme. Le cœur de l’homme. Sa bravoure comme son orgueil. C’est le blues andalou. Olé !
Chico a du caractère. Il fonde son propre groupe, Chico and the Gypsies, et à Dieu vat ! Il a été envoyé spécial pour la paix de l’UNESCO. Il a joué, avec son groupe, devant Shimon Peres et Yasser Arafat, durant les négociations d’Oslo. Alors que son frère, Ahmed Bouchikhi, fut assassiné, en juin 1973, à Lillehammer, par le Mossad qui l’avait confondu avec Ali Hassan Salameh, suspecté d’être l’un des responsables du massacre de Munich (1972). Faut avoir le cœur bien accroché et les cojones avec, pour continuer à jouer sans vouloir se venger. Olé ! Chico Bouchikhi est père de quatre enfants (Réda, Tonino, Myriam, Sonia). Il a été marié à Marthe Reyes, la fille de José Reyes, le père des fils Reyes, membres du groupe Gipsy Kings. Il vit actuellement à Saint-Rémy-de-Provence. Olé !