RAYMONDE PESCHARD

Raymonde Peschard

Par Mustapha Boutadjine - Paris 2012 - Graphisme-collage, 100 x 81 cm

La beauté solaire

Par Anissa Bouayed Historienne

Raymonde Peschard. Sa photo fit la une des journaux colonialistes pendant la guerre d’Algérie. Pas pour la beauté de ses traits réguliers mais pour attiser la chasse à ceux que cette presse appelait « les terroristes ». L’Écho d’Alger titre ainsi le 22 mars 1957 :
« Raymonde Peschard : La communiste des bombes placées au Milk Bar et dans le car de Diar es-Saada avait pendant deux mois fait des “retraites” dans des couvents aux environs d’Alger. » Une photo livre à la vindicte publique le visage d’une belle jeune femme blonde au regard franc. Raymonde Peschard, recherchée pour un attentat qu’elle n’a pas commis, est en effet entrée dans la clandestinité depuis plusieurs mois, réfugiée chez les sœurs blanches de Birmandreïs. Comme d’autres militants communistes qui agissent en patriotes algériens, Raymonde Peschard soutient activement la lutte pour l’indépendance que mène le FLN depuis novembre 1954. Née en 1927 à Saint-Eugène (Bologhine), quartier populaire d’Alger, fille de cheminot communiste, elle entre très tôt aux Jeunesses communistes puis au PCA. Assistante sociale à l’EGA (Électricité et gaz d’Algérie), où œuvre également Fernand Iveton, Raymonde Peschard travaille et milite entre Alger et Constantine, devant changer de ville devant les mesures de répression, surtout après l’interdiction du PCA en septembre 1955. L’accord conclu en juillet 1956 entre les directions du FLN et du PCA se traduit entre autres par la possibilité pour des militantes comme Raymonde Peschard de monter au maquis dans la wilaya III (Kabylie) comme infirmières, où sa beauté solaire et son charisme la font surnommer Taous (le paon). La guerre s’intensifiant, l’ALN décide d’évacuer médecins et infirmières vers la Tunisie. Leur convoi est pris dans un accrochage avec l’armée française dans les monts Bibans, le 26 novembre 1957. Une partie de ce groupe est immédiatement abattue. Danielle Minne (Djamila Amrane) ou Djoudi Attoumi témoigneront de la fin courageuse de Raymonde Peschard. Elle n’avait pas trente ans. S’inspirant des photos d’époque, Mustapha Boutadjine, par assemblage, superposition, recouvrement, restitue dans ce portrait l’aura d’une femme engagée pour que cesse la nuit coloniale et pour la liberté de son pays, l’Algérie.