Le rastaman jamaïcain
Par Victor Hache Journaliste à L’Humanité
Sans lui, le reggae n’aurait pas connu une telle destinée. Grâce à son charisme exceptionnel, Bob Marley a réussi à faire découvrir ce style musical, apparu en 1968 à la Jamaïque, dans le monde entier. Né le 6 février 1945 à Nine Miles, près de Rhoden Hall, dans la province de Saint-Ann en Jamaïque, Nesta Robert Marley, alias Bob Marley, est l’enfant d’une mère noire, Cedella Malcolm, et d’un père blanc, le capitaine Norval Marley, issu d’une famille de planteurs jamaïcains d’origine britannique.
C’est en voyant son oncle jouer de la guitare et du banjo dans différents groupes de bals que Nesta voudra devenir musicien. À dix-sept ans, toujours avec Bunny Livingston (futur membre des Wailers), il tente sa chance, rejoint par Peter Tosh, qui leur apprendra à jouer de la guitare. Ainsi naîtront les fameux The Wailers, formidable trio vocal qui interprétera d’abord des cantiques, s’ouvrant peu à peu aux thèmes qui font la légende du reggae : l’amour, les luttes sociales et la spiritualité. En 1966, il se marie avec Rita, à qui il arrive d’être choriste au sein des Wailers, lesquels allaient connaître une ascension extraordinaire avec des titres inoubliables, tels Get up, Stand up, ou I Shot the Sheriff.
La suite, on la connaît. Adepte du rastafarisme, mouvement qui exalte les origines africaines et éthiopiennes de la civilisation chrétienne, Bob Marley a contribué à donner une aura spirituelle à sa démarche musicale. Il incarnera à la fois la rébellion et la non-violence.
Une fantastique aventure où Marley n’a eu de cesse de vouloir partager la philosophie rasta qui imprégnait ses chansons avec le plus grand nombre. Jusqu’à ce jour où, amaigri et victime de malaises, il passe des examens. Le diagnostic des médecins est sans appel : le chanteur est atteint d’une tumeur au cerveau. Mais il ne veut pas s’arrêter et part se produire à Pittsburgh où il donne un dernier concert le 21 septembre 1980. Épuisé et à bout de forces, il ne peut plus continuer. Son entourage décide alors d’annuler les autres concerts de la tournée. Rapatrié en urgence, hospitalisé à Miami, de nouveaux examens révèlent que son cancer s’est propagé. On ne lui donne plus que quelques jours à vivre.
La quête mystique du rastaman jamaïcain l’avait poussé quelques années plus tôt à se rendre en Éthiopie, considérée comme l’autre berceau du reggae. À la fin de sa vie, le 19 novembre 1980, il se fait baptiser à l’église orthodoxe éthiopienne porteuse du culte rastafari dont il se sentait proche, prenant le nom de Berhane Sélassié, Lumière de la Sainte-Trinité.
Depuis, l’astre solaire du reggae illumine le monde grâce à des hymnes qui ont fait de lui un héros de l’histoire de la musique du XXe siècle. Issu d’un milieu pauvre, Bob Marley a atteint à l’universel. Un artiste au destin magnifique dont la musique rassemble aux quatre coins de la planète. En huit ans de carrière (1973-1981), il deviendra ainsi un musicien parmi les plus écoutés et respectés jusqu’à devenir un symbole, l’emblème de tous les opprimés, qui le considèrent presque comme un prophète. Un mythe qui s’est accentué avec sa mort à l’âge de trente-six ans en 1981, à Miami, en Floride. Il est aujourd’hui une figure culte du reggae jamaïcain que des générations de fans continuent de vénérer.