HIROSHIMA NAGASAKI

Hiroshima Nagasaki

Par Mustapha Boutadjine - Paris 2004 - Graphisme-collage, 100 x 81 cm

Le crime de guerre, le crime contre l’humanité

Par Kolin Kobayashi Journaliste, correspondant de Days Japan à Paris

Le discours officiel américain concernant Hiroshima et Nagasaki justifie aujourd’hui encore ces deux génocides insupportables comme si les états-Unis n’auraient pas pu gagner la guerre sans ces bombes atomiques, et cette prise de position reste inchangée. Or, d’après tous les documents publiés, y compris ceux d’archives déclassées, le discours officiel américain ne tient plus. En 1945, le Japon était dans une situation difficile sur le plan logistique et matériel, les Américains savaient qu’il allait perdre la guerre, sans bombe A. Ces crimes devraient être reconnus au plan international. Les bombes atomiques, y compris celles à l’uranium appauvri, doivent être totalement interdites dans toutes les guerres.

Les crimes ne se limitent pas à ces bombardements : il y a aussi ceux commis après les faits. L’ABCC (Atomic Bombes Casualty Commission) a fait des recherches sur les victimes des bombes à partir de 1946. Mais les données ont été collectées seulement à partir de 1951. Ce n’était nullement pour soigner les victimes, mais simplement pour étudier les pathologies. On sait aujourd’hui que ces études ne sont pas pertinentes, car la direction de l’ABCC n’a pris en compte que les victimes se trouvant dans un rayon de 2 km du point zéro de l’explosion, ignorant l’existence de la population contaminée par la pluie noire dans la banlieue d’Hiroshima ou de Nagasaki, et des personnes irradiées en revenant vivre dans ces villes quelque temps après les explosions. L’intention de l’ABCC n’était pas de dévoiler la vérité sur les conséquences sanitaires des bombardements d’Hiroshima et Nagasaki, mais de présenter les bombes comme propres et sans conséquences graves. Et les conclusions de ces études incomplètes et biaisées servent de bases aux normes pour toute la radioprotection internationale jusqu’à aujourd’hui.

Dans la première période de la guerre froide, les Américains et les Soviétiques se préparaient réellement à une guerre nucléaire dans les années 1950. C’est la raison pour laquelle ces deux pays, chacun de son côté, multipliaient les essais nucléaires pour inventer la bombe la plus puissante, en référence à celles d’Hiroshima et de Nagasaki.
Les États-Unis en ont même réalisé sur leur propre territoire : ce qui a provoqué l’indignation dans le monde entier et la création des mouvements antinucléaires. Pour calmer cette indignation, le président américain de l’époque, Eisenhower, a prononcé un discours à l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies, le 8 décembre 1953, intitulé Atoms For Peace, qui n’était qu’une stratégie pour obtenir une hégémonie dans la course nucléaire avec les Soviétiques.
Concernant les essais nucléaires effectués notamment dans l’océan Pacifique par les États-Unis, l’Angleterre et surtout la France, pendant vingt-quatre ans, les conséquences sanitaires et les impacts sur l’environnement ont été minimisés – surtout aux îles Marshall, par les Américains, et à Mururoa, par les Français. Les pêcheurs de thon du bateau Lucky Dragon n° 5 sont revenus au port Yaïzu après avoir été fortement irradiés le 1er mars 1954, dans une zone des îles Marshall, par les cendres radioactives provenant de l’explosion d’une bombe à hydrogène américaine nommée Bravo. Ce bateau de pêche n’était pas le seul bateau, il y en avait une centaine. Sur l’île de Rongelap, où vivaient plusieurs centaines de personnes, s’est abattue une pluie de cendres qui ont recouvert le sol sur trois centimètres, mais les habitants ont été abandonnés sans secours pendant cinquante heures, sous une radioactivité intense. Ils ont été déplacés dans une autre île mais, après 58 ans, ils ne sont toujours pas reconnus comme irradiés et ils n’ont obtenu aucune indemnisation ni soins particuliers. Au total, dans le monde entier, il y a eu plus de 2 050 essais jusqu’en 2007.

Avec le temps, l’accident de Tchernobyl est probablement plus grave que Hiroshima et Nagasaki. Et nous verrons bien un peu plus tard les conséquences réelles de l’accident de Fukushima-Daiichi.