Passerelle Orly Sud présente les œuvres en collage de Mustapha Boutadjine, en hommage aux grandes figures féminines Du 13 au 29 décembre 2024 au Centre culturel ARAGON-TRIOLET, 1, place Gaston Viens-Orly.
Le vernissage de cette exposition a eu lieu dans le cadre de la « Nuit de la Solidarité » au profit des enfants palestiniens et libanais.
« Avec les moyens qui lui sont propres, Mustapha Boutadjine célèbre les Algériennes et leurs camarades qui se sont battues hier pour l’indépendance de leur pays et, aujourd’hui, pour faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes. Égalité qui est au cœur des avancées de toute société.
Je souhaite que cette exposition donne sens à ce combat et rencontre le succès qu’elle mérite. »
Gisèle Halimi
LA « MAMA AFRICA », UNE VOIX AU SERVICE DE LA LIBÉRATION DES NOIRS
Par Pierre Barbancey Grand reporter à L’Humanité
Ce n’est pas pour rien si Miriam Makeba était surnommée « Mama Africa ». De son vrai prénom Zenzi (diminutif de Uzenzile), elle était connue dans le monde entier pour son tube, Pata Pata, mais était une figure de la lutte anti-apartheid. Née à Johannesburg le 4 mars 1932 d’une mère swazi et d’un père xhosa, elle fut d’abord la voix du groupe The Manhattan Brothers, qu’elle accompagna en tournée aux États-Unis en 1959. Le succès arriva pour Miriam Makeba avec Pata Pata, une chanson écrite en 1956 et enregistrée en 1962.
Lutte anti-apartheid et lutte pour les droits des Noirs, partout dans le monde, ne faisaient qu’un. En 1965, elle fut ainsi la première femme noire à obtenir un Grammy Award, partagé avec le chanteur Harry Belafonte pour leur disque commun, An Evening with Harry Belafonte and Miriam Makeba ! En 1969, elle épouse Stokely Carmichael, l’un des dirigeants des Black Panthers, figure de la lutte pour les droits civiques. Ce qui lui vaudra de nombreux ennuis avec la justice américaine et l’obligera à s’exiler en Guinée.
Le régime d’apartheid ne s’y est pas trompé : après une série de concerts dans le monde entier, il la déchoit de sa nationalité pour sa participation à un film anti-apartheid, Come back to Africa. Aux yeux des racistes blancs, Miriam Makeba est une paria. Elle n’est pas autorisée à rentrer dans son pays pour assister aux obsèques de sa mère et vivra en exil durant 31 ans. Jusqu’à ce que Nelson Mandela lui demande de rentrer. L’apartheid est bien fini !
Une véritable vie de combat. À soixante-seize ans, elle chantait en Italie, lors d’un concert en soutien à Roberto Saviano, l’auteur du livre Gomorra, menacé de mort par la ’Ndrangheta, lorsqu’elle s’est effondrée, terrassée par une crise cardiaque.
La chanteuse noire sud-africaine n’a pas cessé de chanter la libération africaine, faisant de ses spectacles de véritables meetings contre le régime raciste. Elle a puisé son inspiration dans la culture populaire du continent noir, dépassant le simple folklore pour transformer les mélodies traditionnelles en hymne à la vie.
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MYRIAM MAKEBA : LA VOIX DE LA LIBÉRATION
Tarek Ghozlane, Algérie-News, 10 novembre 2008
C’était aux temps des luttes et des espoirs malmenés mais encore vivants, aux temps des illusions ou les mythes de la libération étaient encore puissants et rugissaient dans la nuit africaine comme un chœur de lions. En juillet 1969, la capitale vivait son plus grand, l’ultime, moment de joie collective depuis l’indépendance. Dans le joyeux tumulte du festival panafricain, une voix s’élevait au-dessus de toutes les autres, et Dieu sait qu’elles étaient belles toutes ces voix du continent, pour chanter la liberté du peuple sud-africain.
Tout Alger des quartiers populaires chantait à l’unisson Pata Pata et Miriam Makeba remplissait le stade des Anassers, drainant à sa suite des cortèges d’admirateurs à chacune de ses nombreuses sorties dans les rues d’Alger. Au-delà du festival, la voix puissante et sensible de la diva des townships était celle de l’Afrique toute entière. Alger avait adopté Miriam Makeba et la cause qu’elle portait au plus haut. Elle a fait à elle seule bien plus et mieux que toutes les campagnes d’information et d’explication, plus que toutes les émissions politiques et les articles de presse. Par la magie de sa présence majestueuse et souriante, par la seule vertu de son chant généreux. Ainsi, le combat des noirs d’Afrique du sud contre l’abomination de l’apartheid était celui de tous. Même ceux qui n’avaient jamais entendu de musique d’Afrique australe et qui n’étaient pas familiers des musiques xhosas, swazis ou zoulous trouvaient tout de suite le rythme pour le plus grand plaisir de la chanteuse et de ses musiciens. Les concerts de Miriam Makeba où alternaient blues mélancoliques et graves et des rythmes endiablés étaient des purs moments de symbiose. Miriam Makeba était des nôtres.
Ceux qui – ils ont encore nombreux – qui ont assisté à ce concert témoignent du bonheur à écouter cette femme frêle à la voix qui semblait porter sur toute la baie d’Alger. Et tous, y compris les opposants au régime déterminés mais déjà bâillonnés, étaient très fiers que l’Algérie ait délivré un passeport à la grande dame de Johannesburg. De ces moments partagés dans ce qui fut La Mecque des mouvements de libération, il reste un film-témoignage particulièrement émouvant de William Klein. La princesse de la liberté, petite et menue y apparaît dans toute sa grâce aux côtés de son ex-mari le leader des Blacks Panthers, Stokeley Carmichael. La joie de vivre et l’enthousiasme de la belle sud-africaine dominent le film de toute la force de son sourire.
Les années ont passé, et si l’Afrique du Sud est libéréé de l’emprise du fascisme livide bien des promesses n’ont pas été tenues. Miriam Makeba a traversé des épreuves, sa fille unique est décédée à 36 ans, n’est pas revenue à Alger mais n’a jamais baissé les bras et cessé de se battre. Cette artiste reconnue par ses pairs avait été la première africaine récompensée par un Grammy Award a finalement retrouvé son pays natal au lendemain de la libération de Nelson Mandela. Nous n’avions plus que d’épisodiques nouvelles de la star de la Liberté. Bien rares furent ceux qui eurent le privilège de l’écoute de son disque Homeland sorti en 1996, le temps des luttes de libération était achevé dans l’horreur des guerres internes et des luttes sanguinaires pour le pouvoir et l’argent. Homeland, disque magnifique est un hymne au pays retrouvé après un interminable exil. Ce disque récompensé en Afrique du Sud, aux Etats-Unis et en Europe n’a pas rencontré le public algérien. Les radios du continent, et celles d’Alger ne font pas exception, ne passent plus que très rarement les chansons de Madame Makeba à l’heure de la vulgarité triomphante et de la musique commerciale.
La grande voyageuse a finalement atteint l’ultime port aux premières heures de l’aube en Italie, près de Caserte, peu après un concert de solidarité en faveur du grand écrivain italien Roberto Saviano, l’auteur du terrible roman Gomorra. Son cœur s’est arrêté de battre, elle n’avait que soixante-seize ans. Elle était venue chanter et témoigner pour un homme libre menacé par la Mafia. Miriam Makeba est morte comme elle a vécu, en artiste, en femme libre et en combattante.
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Affiche : america basta