ŠABAN BAJRAMOVIĆ

ŠABAN BAJRAMOVIĆ

Sous les pavés, le Gitan

Šaban Bajramović
Par Mustapha Boutadjine
Paris 2012 - Graphisme-collage, 130 x 95 cm

Les chevaux rapides

Par Todor « Tosha » Vukmirovic Musicien du groupe Slonovski Bal

Šaban Bajramović est né en 1936 à Niš, en Yougoslavie. L’histoire de sa vie contient tous les éléments de légende que les vieilles Romnis racontaient pour raccourcir les longues nuits d’hiver. En elle il y a le feu, les chevaux rapides, les femmes magnifiques aux longs cheveux noirs, les voyages sans fin, les passions plus fortes que la raison, et la musique tzigane, celle qui va droit au cœur.
Il voulait devenir footballeur mais le sort en a décidé autrement : il deviendra le plus grand chanteur tzigane de tous les temps, le King.
À dix-neuf ans, lors de son service militaire, il déserte pour retrouver son amour de jeunesse, ce qui lui vaut cinq ans d’emprisonnement dans l’Alcatraz yougoslave, Goli Otok. C’est là qu’il commence à chanter et à s’émanciper en rencontrant des intellectuels et opposants au régime titiste.
Il apprendra à écrire ses chansons, devenues aujourd’hui des standards de la culture yougoslave et rom, tels que Giljam Dade, Sajbija, Hanuma, Pirav Mange Korkoro en rom, ou encore en serbe Pitao sam malog puza, ou Mesecina dans le film Underground d’Emir Kusturica. Ses chansons parlent du blues tzigane. Il est également connu pour son interprétation magnifique de Djelem Djelem, l’hymne des Tziganes.
Plus tard il chantera pour Tito qui l’appréciait tout particulièrement et avec qui, raconte-t-il, il blaguait en langue romani.
Shabi, c’est son surnom, ne s’est jamais préoccupé du lendemain, c’était un homme de l’instant. On raconte qu’il ne répétait jamais avec ses musiciens, il leur disait simplement de suivre, et la magie opérait. Parfois, lorsqu’il gagnait des sommes folles à certains mariages tziganes, il pouvait très bien tout perdre le lendemain car il aimait le jeu, l’alcool, les femmes et les Mercedes, même s’il n’a jamais eu le permis de conduire !
À lui seul il représente l’extravagance et la poésie du peuple tzigane, qui ne rentrera jamais dans les cases de notre monde moderne.
Il est mort en roi, le 8 juin 2008, certes pauvre, mais respecté et aimé, avec beaucoup plus de sujets que les souverains d’États n’en auront jamais.